Et pourquoi cet espace
où règne un si grand froid.
Claude Vigée
La salle de réanimation,
ton corps agité de spasmes
ton petit torse blanc.
Nu.
Père, comme tu as vieilli !
C’est arrivé
près des bruyères
un soir au bas de l’escalier.
Tu t’es effondré
portant la main sur l’arrière de la tête
comme après un coup de massue
puis perdant tes eaux
comme une femme enceinte.
J’ai quitté mon travail dès l’alerte
pestant contre le soleil couchant
qui aveuglait ma route.
Soutenue par la bonne voisine,
mère attend recroquevillée
près de la table de cuisine.
Elle s’écroule dans mes bras.
L’hôpital, massif bloc de béton,
ouvert au noroît sur la colline.
Bloc 2, vous ressortez à gauche
– Bon courage –
dit aussi l’hôtesse.
Il n’y a pas d’espoir
– Quelques heures, peut-être quelques jours –
dit le médecin de garde à l’accent prononcé.
Tu te bats père,
ton cœur si solide.
La nuit tombe,
cavale blanche.
Nous nous perdons dans les couloirs
sortant de l’ascenseur.
L’angoisse, soudain.
Dehors le noir.
Je ne dors pas
murmurant des paroles de soutien à distance.
En chien de fusil sur l’édredon,
j’attends l’aurore,
l’angélus de 7 heures.
Mère gémit dans la chambre à côté.
Je m’approche et tends la main.
Elle sursaute
– C’est toi !
Ah ! tu as la même main que ton père –
Nous tenons mère par l’épaule,
elle penche la tête vers sa poitrine.
Le médecin de famille est affable,
il pose l’ordonnance près de la corbeille de fruits
et ne demande rien.